• A moi

     

    douar gzoula - un petit âne -2-

     

     

    Ane Maudit

    J’ai froid, si froid, j’ai mal, si mal !

    Ma vie de misère se termine ici,

    Pourquoi crever ainsi ? Je n’ai rien fais de mal !

    J’ai tout donné, pour rien et c’est fini !

     

    Cette douleur qui me taraude le corps

    M’a couché là dans cette boue immonde

    Je n’y vois plus et je sens la mort

    Qui m’attire à elle vers son triste monde

     

    Tout a commencé, je ne sais plus, il y a longtemps

    Ma mère était là douce et tendre auprès de moi

    Ils sont venus, m’ont attaché, battu, je criais « Maman ! »

    Je ne l’ai jamais revue ne serait ce qu’une fois

     

    J’ai froid, si froid, j’ai mal, si mal !

    Je n’ai jamais connu mon père, en avais je un ?

    C’est le sort de notre race, quoi de plus normal

    Depuis la nuit des temps, souffrir est notre destin

     

     

    Courir sous les coups, crouler sous les charges

    Moqués de tous, nous sommes condamnés

    Sous le soleil brûlant, sous la neige, sous l’orage,

    Pas de pitié pour nous, nous sommes damnés.

     

    Un jour pourtant, un petit garçon m’a caressé,

    Il me parlait tout bas, je ne le comprenais pas,

    Dans mon cœur une explosion de joie m’a submergé

    Quelqu’un a crié, il est parti en courant me plantant là.

     

    J’ai froid, si froid, j’ai mal, si mal !

    Toujours sale et crotté, assailli par les mouches,

    Et ce fouet qui claque sur mes jambes, mon poitrail,

    Et ces cordes qui m’entravent jusque sur ma couche,

     

    J’ai eu, un jour, pour une de mes semblables de l’envie

    Une tendresse sans borne et de l’amour à donner,

    Elle aussi m’aimait, on se le disait dans la nuit,

    Mais tous deux entravés n’avons jamais pu nous aimer.

     

    Triste vie, triste sort, inconscient, un de mes aïeux,

    Il y a deux mille ans a porté sur son dos,

    De village en village votre Christ, votre Dieu,

    Condamnant ainsi sa descendance à tous les maux.

     

    J’ai froid, si froid, j’ai mal, si mal !

    Et ces lames aiguisées qui descendent de l’Atlas,

    Transperçant mes chairs torturées d’animal,

    D’âne maudit du Maghreb agonisant, seul, dans la glace.

     

    Lybertipat

     

     


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